École d'Arts Martiaux Chinois de Brice Amiot

Le Combat initiatique

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Je rappelle que Brice Amiot propose un stage de Wing Chun les 24 et 25 Juin 2023 sur ce thème.

 

La voie des arts martiaux traditionnels chinois tourne autour d’un axe central qui fait d’elle une voie initiatique, c’est-à-dire un cheminement d’apprentissage qui, par l’expérience, par le vécu, peut nous permettre de comprendre et d’intégrer les lois régissant la circulation de la vie dans l’univers. Cet axe central, c’est le combat.

Ainsi pour l’artiste martial digne de ce nom, le combat devient le symbole de la vie, avec ses changement constants. L’adversaire, lui, devient le symbole de l’adversité qui naît de nos dysharmonies internes et de nos faiblesses. Il est l’autre nous-même que nous avons fabriqué en nous identifiant à ce que nous pensons savoir sur nous et sur le monde qui nous entoure. Il est la prison dont les barreaux sont nos croyances, nos schémas de fonctionnement, nos héritages ancestraux, familiaux, nos blessures, nos repères ou encore tout simplement le filtre à travers lequel nous regardons ce qui se passe à l’extérieur de nous-même. Il est celui qui nous renvoie la réponse aux actes que nous posons et qui témoignent de nos prises de position, de nos choix et puisque le combat symbolise la vie éternellement muable, il est ce que nous renvoie cette vie face à ce que nous croyons et ce que nous faisons en conséquence.

Pensez-vous qu’il faille s’opposer à cet envoyé de la vie ? Pensez-vous pouvoir lutter contre lui ? N’auriez-vous pas plutôt intérêt à entrer en harmonie avec cet autre vous-même afin que ce combat devienne une occasion d’établir la paix avec lui ?

Ces questions sont celles que les sagesses martiales ancestrales souhaitaient que nous nous posions. Des questions qui dérangent et qui nous invitent à rencontrer notre pire ennemi.

Est-ce pour cette raison que les Arts Martiaux ont été transformés en sports d’opposition à l’aube de l’ère moderne ?,Partant du principe que « qui fait la paix avec lui-même fait la paix avec les autres », leur popularité naissante auprès des occidentaux était-elle dangereuse pour qui avait un intérêt à entretenir les divisions et les guerres ? Était-ce pour ces arts initiatiques, un moyen de survivre que de devenir l’antithèse de ce qu’ils étaient en tant que voie d’éveil ?

Peut-être, en tous cas le constat de ce que sont devenus les arts martiaux est triste ; mais puisque vous en êtes à me lire, peut-être êtes-vous sensible à l’idée de retrouver ce qui faisait autrefois de ces disciplines des arts initiatiques.

Pour comprendre comment le combat peut être une source d’enseignements concernant le sens de notre existence, il faut partir de quelques points de vue que partagent bon nombre de traditions ésotériques et philosophiques. Il faut, par la même occasion rappeler que les arts martiaux chinois avaient pour objectifs d’être des supports de transmissions de sagesses issues de ce type de tradition puisqu’ils ont été largement façonnés par le bouddhisme Chan, le Confucianisme ou encore le Taoïsme.

1er point de vue : La création implique qu’il y ait un créateur, une grande intelligence à l’origine de toute existence.

2nd point de vue : La création est un vaste programme fait de cycles. La distribution de la vie y est organisée au sein d’une échelle de plans d’évolution graduels en termes de taux vibratoire. Tous ces plans sont liés pour former un tout dont les deux polarités sont l’énergie sous sa forme subtile, immatérielle et l’énergie sous sa forme palpable, matérielle. Ces deux polarités sont nommées CIEL et TERRE.

3ème point de vue : Les plans de la création sont organisés en quatre grands états vibratoires de l’énergie : le Feu, l’Air, l’Eau et la Terre que l’on nomme éléments. Le FEU représente la source de toute vie avec ses lois d’organisation. L’AIR représente les concepts, les idées, tout ce qui est de l’ordre de l’état gazeux. L’EAU représente les liquides, le véhicule de l’énergie de vie dans la matière. La TERRE représente la matière, tout ce qui est solide, l’état le plus dense de l’énergie. Vous noterez que j’adopte une vision occidentale des éléments plus facilement perceptible pour notre culture mais soyez conscient que les visions asiatiques qui emploient un système de 5 ou 8 éléments retranscrivent une idée similaire.

4ème point de vue : Une âme est un fragment du créateur qui, à travers ce grand programme qu’est la création, vient expérimenter les différents états vibratoires de l’énergie. Le créateur a donc, à travers les missions qu’il confie aux âmes, l’intention de se connaître lui-même intimement puisqu’il les envoie explorer toutes ces dimensions.

5ème point de vue : Pour passer de l’état matériel de l’énergie à son état le plus subtil, l’âme voyage à travers des règnes. Certaines traditions en nomment sept : le règne minéral, le règne végétal, le règne animal, le règne humain, le règne des vertus, le règne des archétypes et des lois et le règne de la source de toute vie.

L’homme est donc un trait d’union entre le Ciel et la Terre puisqu’il est au centre de cette échelle de règnes. Cela signifie qu’il relie les énergies matérielles et les énergies subtiles et que sa mission en tant qu’homme, c’est de s’élever vers le stade supérieur de l’évolution, le stade immatériel des vertus. Ainsi, l’homme qui vit selon la vertu vit en accord avec sa mission qui est de les porter sur la terre pour s’élever vers le règne supérieur.

6ème point de vue : Un homme est donc une âme incarnée. Dans notre culture judéo-chrétienne, nous pourrions définir l’âme dont je parle comme un fragment d’essence divine venu expérimenter la matière, c’est-à-dire les aspects les plus vibratoirement denses de l’énergie pour prendre appui dessus afin de retourner vers des aspects plus subtils. En s’incarnant, cette âme se revêt de plusieurs couches d’énergie que nous nommons « corps ». Bien entendu, elle prend un corps physique qui sera son véhicule dans la matière et son outil d’interaction avec le monde extérieur, mais également un corps de désirs, un corps de sentiments, un corps de pensées et un corps de croyances. Toutes ces couches constituent un être humain qui, la plupart du temps, en venant au monde, perd la connaissance de son origine et c’est là tout le jeu de l’incarnation : la retrouver. En perdant la mémoire de sa source, l’homme s’en sépare et choisit de croire qu’il est son corps physique mortel et l’ensemble des désirs, des sentiments et des pensées qui émaneront des croyances dont il a hérité ou qu’il adoptera au fil de son existence.

7ème point de vue : Il y a un canal de communication entre ce dont l’homme est conscient à la périphérie de lui-même et son âme. Toutes les traditions spirituelles cherchent à véhiculer des méthodes de nettoyage ou de reconstruction de ce canal. Ces méthodes pourraient donc permettre à l’Être humain de se connaître au-delà de ses croyances et de vivre aligné sur ce qu’il est à l’intérieur de lui-même et non en fonction de ce qu’il vit à l’extérieur sachant que l’extérieur est le reflet de son intériorité. Si ce point de vue est abordé ici, c’est que les pratiques martiales ancestrales constituaient l’une de ces méthodes.

8ème point de vue : L’état de vacuité et la quête du moment présent sont des moyens de reconnexion à ce Soi profond enfoui sous toutes les couches de croyances qui nous définissent.

9ème point de vue : L’univers a des lois et l’homme est un microcosme. Les lois qu’il observe à l’extérieur de lui-même sont celles auxquelles il est lui-même régi. Le constat de l’existence de ces lois invite l’homme à s’y référer comme à un mode d’emploi de ce qu’il est dans toutes ses dimensions. S’il souhaite vivre la paix et la santé il va devoir apprendre à vivre en harmonie avec ces lois.

10ème point de vue : Le fonctionnement harmonieux de l’Univers et de tout ce qui y vit, s’appuie sur une poutre faitière qui n’est autre que le principe fondamental d’équilibre entre les polarités complémentaires et indissociables. Lorsque, dans le mouvement constant, ce principe est respecté, l’énergie de vie circule de façon optimale à travers l’être vivant qui n’est autre qu’un émetteur/récepteur de cette énergie.

Lorsque tous ces points de vue sont adoptés, le combat peut se révéler initiatique. Il peut être appréhendé en tant que mode de découverte du Soi. C’est ce que les arts martiaux traditionnels Chinois en ont fait.

Le verbe découvrir suggère bien que dans les traditions martiales ancestrales Chinoises, le combat se devait d’être un moyen de se dépouiller de toutes les illusions de ce que nous croyons être afin de découvrir ce que nous sommes au-delà. C’est bien avec cet adversaire surpuissant qu’est l’ego qu’il fallait interagir intelligemment.

Mais avant de décrire comment les arts martiaux abordaient le combat afin qu’il soit initiatique, parlons d’abord de l’intérêt qu’il peut revêtir en tant que creuset.

Tout d’abord, le combat est une situation extrême qui réveille en nous une énergie puissante, celle de l’instinct de survie. L’homme qui vit sans adversité ou sans contraintes, laisse cette énergie s’endormir et il s’affaiblit. Il n’est plus en mesure d’être combatif et même de pouvoir se défendre contre les agressions de la vie courante comme les changements de climat ou les virus… Chez l’homme moderne, complètement englué dans le confort et l’assistanat, le combat devient parfois un moyen de se sentir vivant.

Ensuite le combat est un élément dans lequel tout change constamment et très vite, ce qui en fait un mode d’entraînement à l’adaptation de très haut niveau. La vie est changement constant et avoir la faculté de le reconnaître, de s’y adapter et de l’accompagner constitue une force magistrale.

Le combat ne laisse que très peu de place à la réflexion, il mobilise toute notre attention sur les faits à gérer immédiatement dans le moment présent. Il nous extrait de nos références au passé ou à l’avenir sauf lorsqu’il engendre la reconnaissance sensorielle d’une situation vécue ou la projection d’une issue au combat et provoque des émotions et des comportements incontrôlables.

Le combat demande, pour être abordé régulièrement avec sérénité, des aptitudes physiques et mentales qui ne pourront être que la condition d’une santé de fer.

Enfin, le combat ne laisse que peu de place aux théories illusoires, aux mensonges et aux croyances. La vérité des faits et des forces qu’il met en jeu est indiscutable. Tout s’y vérifie parfaitement en termes de lois physiques universelles mais également en termes de forces énergétiques et psychologiques.

Maintenant définissons les objectifs d’une école initiatique. Celle-ci se veut être une école de la vie, c’est-à-dire une école qui enseigne comment le Ciel (qui est l’émetteur de la vie et qui l’organise en principes et en lois universelles, l’énergie subtile) féconde la Terre (c’est-à-dire le récepteur de l’énergie de vie, la matière, le monde des manifestations dans les états les plus denses de l’énergie). Elle souhaite ainsi éveiller l’homme au fait qu’il est non seulement soumis à ce processus de fécondation, mais étant debout entre le Ciel et la Terre, qu’il est censé, comme nous l’avons déjà dit, l’accompagner à travers la réalisation de sa mission d’âme et sa créativité. Elle souhaite lui rappeler qu’il est un microcosme, qu’il a un Ciel et une Terre en lui, qu’il féconde son monde intérieur et extérieur par ses pensées et ses actes et en voit la manifestation.

De ce fait, l’initié qui sort de ces écoles est un être humain dont la pensée, les désirs, les sentiments et les actes doivent être alignés sur sa mission d’âme, mission qu’il doit trouver en perçant les couches de ce qui le définit dans le présent : ses mémoires. Par sa réalisation personnelle, il contribue à faire descendre le Ciel sur la Terre, c’est-à-dire à poser, dans le monde, des actes en accord avec la portion d’essence divine qu’il est à l’origine en commençant par incarner les vertus et par vivre en accord avec les lois universelles.

Il ne nous reste plus qu’à mettre en lumière ce que le combat peut avoir d’initiatique pour comprendre ce que les Arts Martiaux Chinois étaient à l’origine lorsqu’ils se considéraient comme des « voies ». Pour cela je vais choisir de m’appuyer sur le style traditionnel que je connais le mieux : Le Wing Chun.

Cet art, tout comme le Taijiquan, est une expression martiale du symbole YIN YANG. Le pratiquant y est invité à en comprendre la signification profonde et à en devenir une représentation vivante. Dans le Wing Chun le combat est censé y être abordé comme un exercice méditatif hautement symbolique auquel nous ne pouvons accéder qu’après y avoir été préparé. Il ne devrait pas y être considéré comme un concours ou une démonstration de quoi que ce soit. On ne le mène pas pour prouver sa force mais pour se plonger dans le moment présent, dans un exercice de haute maîtrise ou plutôt de profonde connexion au Soi et à l’autre. On y cherche la capacité à ressentir les forces physiques, énergétiques et psychiques de l’adversaire et à entrer en harmonie et non en opposition avec ces forces afin de créer un échange fluide au sein d’un mouvement constant. La recherche de l’artiste martial est une démarche de thérapeute et non celle d’un conquérant. Le thérapeute cherche à rétablir l’équilibre de situations déséquilibrées car l’équilibre est la base de la santé et dans le martial, par la pratique du combat, c’est la santé de la relation au Soi et à l’autre qui est au cœur du travail.

Le nombre symbolique 108, cher à ces deux arts que sont le Wing Chun et le Taijiquan nous donne la recherche profonde qui, pour l’artiste martial, est associée au combat : « par le un je cherche l’unité et reconnais que le chemin pour y parvenir est d’éliminer l’opposition au sein de la dualité.

Par le zéro, symbole du vide, je reconnais que le seul ennemi à maîtriser pour parvenir à l’unité est mon ego et la croyance de séparation qu’il engendre envers l’adversaire. La vacuité et la capacité à unir mon corps, mon souffle et mon intention dans le moment présent sont le seul moyen de percer les couches qui recouvrent l’Être non séparé que je suis, uni à toute la création, celui qui est : le « JE SUIS ».

Par le huit, je reconnais que pour éliminer l’opposition au sein de la dualité, je dois maintenir l’équilibre entre les deux polarités du tout que je forme avec l’adversaire au sein des changements perpétuels qu’implique le combat. L’énergie de vie peut ainsi circuler harmonieusement entre mon adversaire et moi-même sous la forme d’un échange fluide dont les mouvements sinusoïdaux et spiralés témoignent de la réalisation de l’objectif de la pratique du combat selon la philosophie martiale originelle. Le combat devient symbole du passage de la vie, du Tao, à travers l’homme accompli. Ce dernier a réalisé la nature immortelle et donc infinie de son âme. »

Le terme accompli que je viens d’employer, est celui que l’on retrouve dans la définition du terme KUNG FU et qui représente un homme qui s’est élevé au-dessus de ses croyances pour réaliser sa mission d’âme et ainsi incarner une vertu sur la Terre.

En conclusion, le combat est initiatique lorsqu’il est perçu comme un travail alchimique, la réalisation à l’extérieur et à l’intérieur de nous-même, du grand œuvre. Je vous rappelle encore une fois que les Taoïstes étaient des alchimistes pratiquant la voie royale, c’est-à-dire, la voie d’étude et de pratique appliquée directement sur l’Être et non sur une matière extérieure. L’objectif du grand œuvre est la réalisation de la pierre philosophale, c’est-à-dire l’union du ciel et de la terre, de nos parts masculine et féminine, de l’énergie subtile et de la matière, de la connaissance de ce que nous sommes au-delà de nos croyances et de nos actes.

Si vous souhaitez en savoir davantage et si vous êtes motivés à l’idée d’aborder les arts martiaux comme un outil de dépouillement personnel et ce, quel que soit votre niveau, je vous invite à venir découvrir la pratique hautement symbolique du combat initiatique dans le WING CHUN ou le TAIJQUAN en ma compagnie au sein des différentes formations que je propose tout au long de l’année et notamment au cours de mon prochain stage de WING CHUN qui aura lieu le 24 et 25 juin prochain sur la commune de Valderoure dans un temple Bouddhiste, l’institut Karmapa, situé en plein cœur des montagnes de l’arrière-pays Grassois. Vous trouverez toutes les informations concernant ce stage et les autres, les cours réguliers et les formations annuelles sur la page transmission de mon site briceamiot.fr.